I vostri ricordi dell'Institut

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Histoires vécues
organizzato nell'ambito di:

In occasione del 70° anniversario dell’Institut français Milano, abbiamo chiesto a tutti, soci, allievi, ex allievi, professori… di raccontare un ricordo di questi anni.

Se vuoi aggiungere la tua storia, scrivici!

Anni 50 a oggi

22 aprile 1950: nasce l’Institut Français a Milano. Nove giorni dopo, il 1° maggio 1950, più modestamente nasco io. Per sessant’anni la nostra vita scorre inconsapevoli l’uno dell’altro. Poi Cupido, sotto le subdole spoglie di un manifesto nella metropolitana milanese, scocca una freccia e la frittata è fatta: non riesco più a lasciarvi. E’ amore, certamente platonico, ma fatale quanto il più impudico dei rapporti carnali. D’altro canto, la Francia è maestra in queste faccende.
Che dire? Grazie di esistere, tantissimi auguri e un brindisi a non lasciarci più.
Un abbraccio virtuale a tutto l’Institut e un ringraziamento particolare a Isabelle, che con la sua pazienza sopporta da molti anni il sottoscritto e tutti i camarades del martedì mattina.
Beppe
 

Anni 60

Avevo 7 anni quando alla Scuola Elementare di via dei Narcisi a Milano nel 1964 l’allora preside propose agli allievi di seguire un corso di Francese fornito dal l’allora  Centre Culturel Français. I miei genitori aderirono subito ed ho un ricordo magnifico 
di un’ insegnante della quale ho dimenticato il nome che ci istruiva facendoci imparare i nomi delle varie tipologie con dei dadi di legno disegnati che portavano il nome.
Era come un gioco ed era nato un amore incondizionato per la Francia La lingua Francese ed i Francesi.
Ora di anni ne ho 62 e sono estremamente legata alla Francia!!!!!!
Grazie di cuore 
Sabrina 

Anni 60 e 70

Souvenirs d’un vieux prof
J’ai enseigné au Centre Culturel
(c’était son nom !)  d’abord de 1961 à 1966 puis sans interruption de 1978 à 1997, année de ma retraite ! Que de souvenirs…! Deux moments de fête en particulier : un Bal Masqué dans le grand salon de via Bigli, avec tous nos élèves ! Le thème était : un titre de livre français. Un grand et gai succès, nos élèves ont montré beaucoup d’imagination ! Pour mon compte, moi qui m’appelle Claudine, habillée en collégienne, j’étais CLAUDINE À l’ECOLE de Colette…
Un autre souvenir, toujours Via Bigli , l’entretien entre UMBERTO ECO et son traducteur en français du PENDULE de FOUCAULT, alors directeur de l’Institut  Français de Naples. Rencontre mémorable, pleine de verve, d’ironie et de sympathie !
Mais mon plus beau souvenir c’est celui de nombre de mes élèves aux  personnalités si variées et leur enthousiasme au contact de notre langue et de notre culture .
Bon anniversaire! 
Claudine

Anni 2000-2005

J’avais officiellement accueilli Umberto Eco au Centre culturel avec un petit discours dont il me remercia en m’en demandant la copie. C’était pure politesse de sa part. Mais, après une soirée OULIPO au Piccolo, le hasard et les circonstances avaient rendu nos rencontres plus fréquentes : ses marques de reconnaissance et de complicité sortaient de la simple mondanité. Un matin d’août, Piazza Castello, dans un Milan désert, au volant de la voiture qui arborait le logo bleu-blanc-rouge du Centre Culturel, je faillis le renverser et ses protestations surjouées se transformèrent en invitation à boire un café. Un aparté avec un des cerveaux du siècle ! 

C’était la finale du concours « Bouchées doubles » que Marie Galey avait lancé : il s’agissait d’inventer le doublage en français d’extraits de films rendus muets.
Une nuée d’adolescents est réunie dans la salle de cinéma, au sous-sol, le rouge  théâtral choisi pour les fauteuils m’a toujours fait penser à celui du Palais Garnier, très Napoléon III donc. Dans ce décor un peu étouffant une jeune fille à appareil dentaire donne la réplique dans un français très chantant à un petit géant baby-fat qui a des R ‘mossa’ parfaitement grasseyées ! Marina s’embrouille dans ses papiers : c’est que nous sommes tous sidérés par la qualité de ce que nous entendons. Et tout cela se passe dans une légèreté miraculeuse qui contraste avec le rouge infernal du sous-sol.

Peu après, ce concours a fait l’objet d’une fiche dans la revue des professeurs de FLE, Le Français dans le monde. Autant dire qu’il s’est mondialisé….

Gilles Castro, attaché de coopération linguistique au Centre culturel français de Milan de 2000 à 2005
 

Anni 2010

Bonjour,
per augurarvi Joyeux 70eme Anniversaire, condivido qui con voi un mio ricordo del corso frequentato presso la vostra sede di Corso Magenta nell’anno 2010-2011: una volta il nostro indimenticabile insegnante Pierre Paul, così teatrale e istrionico, ci coinvolse così tanto nell’imparare una canzone che ce la fece cantare a squarciagola dirigendoci nemmeno fossimo un coro a lezione di canto… mi sono divertita molto!
Un caro saluto e spero che possiate riaprire al più presto.
Con affetto,
Elena 


Buonasera,
ho cominciato a frequentare l’Institut Français nel 2017 in quanto sono un grande appassionato della lingua francese e della Francia.
Nel gennaio 2017 ho fatto il corso in preparazione al Delf B1 e nella sessione di febbraio ho conseguito la certificazione Delf B1 poi ho continuato con i corsi collettivi e nel 2018 ho conseguito la certificazione Delf B2. Ora sono iscritto ad un corso privato in quanto il mio sogno è quello di arrivare a conseguire la certificazione di livello C1.
L’Institut Français e’ un’ottima scuola dove ci sono insegnanti bravissimi e preparati ed è un piacere sentirsi parte di questa bella famiglia.
TANTISSIMI AUGURI ALL’INSTITUT FRANÇAIS PER I 70 ANNI DI ATTIVITÀ.
Vi allego delle mie foto con le certificazioni Delf B1 e B2.
Cordiali Saluti  
Mirko
 

e nel corso degli ultimi 70 anni…

Bonsoir,
J’ai fréquenté plusieurs cours en ligne : mon professeur a toujours été Monsieur Antoine Boissier, que j’apprécie énormément. Mon professeur aime tellement sa profession que le jour de mon oral à l’Institut je l’ai trouvé là pour me soutenir et m’encourager. Difficile à expliquer la joie et l’émotion de retrouver mon professeur virtuel devant moi en personne !
Amalia

Le petit ballon vert.
Une partie de ma vie consacrée à l’IF, de niveau A2 a C1, nombreux profs (pour la plupart sympas mais avec une seule grande exception), des amitiés temporaires et un grand amour, films drôles, film ennuyeux, film incompréhensibles et quelque chef-d’oeuvre, dizaines de visages oubliés, règles compliquées ou pas, exercices un peu ratés, la découverte de la poésie française, les longs trajets en tram quand les yeux ne voulaient rester ouverts.
J’ai choisi l’IF et j’en suis fier.
À bientôt.
Salvatore


L’Institut français de Milan a eu un rôle important dans mon enseignement du français langue étrangère : il a été un centre de ressources pour dynamiser mon activité et une grande opportunité pour mes élèves pour garder un contact direct avec la culture française et pour s’épanouir. Je tiens à remercier les Attachés linguistiques Monsieur Emmanuel Marion et Madame Pion que j’ai connus personnellement et qui ont apprécié les travaux de mes étudiants dans les différents concours proposés par l’Institut.
Je remercie aussi Madame Stéphanie Sauvignon qui a participé à la semaine linguistique sur les certifications organisée par moi-même dans le lycée Gadda-Rosselli de Gallarate où j’enseignais.
Et encore Madame Cécile Desoutter pour son excellent et dynamique cours sur le français des affaires, que j’ai suivi et pour son encouragement à faire participer mes élèves au Concours “Le Mot d’Or” qui les a vus remporter la première place pour trois fois.
Joyeux anniversaire à l’Institut.
Laura

Bonjour,
Juste un message à l’attention des responsables de la médiathèque pour prendre des nouvelles. Nous espérons que vous et vos proches vous portez bien. Mes filles ont l’air de s’etre résignées à continuer l’école en ligne mais demandent souvent quand nous pourrons retourner à l’Institut Francais…  Prenez soin de vous et à bientot.
Joyeux anniversaire
Sincèrement,
Chloé
 

E un ricordo recentissimo, o meglio un racconto

Ispirato al periodo del confinement, questo bellissimo récit è stato scritto in francese da Giuseppe Didato, allievo dell’Institut. Complimenti all’autore e alla sua insegnante Florence Henri!

EN SE RÉVEILLANT

Début avril, lundi matin, le printemps venait de fleurir et les neiges étaient en train de s’estomper, laissant que le bleu lumineux du ciel se répande partout. 
À l’ombre de la chambre, Frédéric était encore entouré de la chaleur de son lit, enroulé dans le drap de coton rouge, dont il aimait bien la souplesse. Il était entièrement couvert par sa couette favorite à rayures jaunes et orange, qu’il avait choisie parmi au moins cent autres pendant les soldes d’hiver.
La tête appuyée sur l’oreiller mou et gonflé, son nez était fourré dans la fragrance rassurante de l’adoucissant à la lavande, dont il n’aurait jamais pu se passer. Ce parfum avait accompagné les meilleurs moments de sa vie et, au cours des plus mauvais et insoutenables parmi ceux-ci, il lui avait donné la confiance de la renaissance, en lui rappelant la senteur des périodes les plus belles et simples.
Frédéric clignait des yeux pour réussir à apercevoir, malgré l’absence de lunettes, le peu de rayons de lumière qui pénétraient à travers les fissures du volet. Il était habitué à explorer la chambre aux premières heures du matin en n’utilisant que le peu de degrés de myopie qui le lui permettaient. Le sommeil de la nuit avait souvent la capacité de lui donner des pouvoirs jamais possédés pendant la journée. La vision était, parmi ses sens, celui qui se renforçait le plus et ce n’était pas rare qu’il oublie de mettre ses lunettes avant de se lever. Le toucher s’accroissait à tel point qu’il pouvait percevoir la texture du tissu et l’ouïe lui permettait de deviner ce que les voisins des étages de dessus et dessous étaient en train de faire. L’odorat lui faisait prévoir ce qui aurait ravivé son nez et ses papilles à la table de la cuisine. C’était pour ça qu’il adorait la nuit : elle nettoie la saleté de la fin d’une journée épuisante et donne l’énergie qu’on ne pourrait jamais croire avoir, en jugeant au moment où l’on s’abandonne au lit après le dîner.
Dix minutes au moins, quinze si c’était possible et s’il n’avait pas d’autres chats à fouetter que les pouvoirs de super-héros qui se développent dans l’obscurité de la nuit. Ce matin-là Frédéric prenait tout son temps : c’était le réveil le plus calme et le plus intime qu’il ait pu imaginer. Intime entre lui et lui-même. Dans la solitude, dans son grand lit spacieux, il commençait lentement à se libérer de l’enchevêtrement des tissus qui l’enroulaient depuis quelques heures. La peau de son corps presque nu essayait de remonter à la surface, à mesure que l’odorat d’un limier laissait place à celui d’un bipède grimpant la raide échelle évolutive. S’il pouvait se permettre tout ce luxe philosophique matinal, c’était parce qu’il était tout seul, ce qui ne lui arrivait pas très souvent. C’était de surcroît parce qu’il ne devait pas aller au travail, et pas seulement ce jour-là. En effet, cela faisait presque un mois qu’il ne sortait jamais : il restait à la maison toute la journée et ne voyait âme qui vive, et personne ne lui rendait visite non plus.

C’était le mois précédent que tout cela avait commencé. Même si c’était prévisible d’en arriver là, Frédéric l’avait considéré une possibilité éloignée ou un cas extrême, jusqu’au jour de la prise de conscience. Il était parvenu au jour le jour à en avoir marre de tout ce qu’il s’était habitué à faire sans même y réfléchir. Et en y réfléchissant, il avait tout à coup décidé qu’il fallait trouver le courage de changer. Ou au moins de prendre une pause. Et il l’avait fait : il avait démissionné et s’était éloigné du monde entier. Il ne répondait ni au téléphone ni aux messages depuis un mois. Pas de télé, pas de radio. Toute la vitesse du quotidien, toute la folie du manque de temps, tout cela était tombé dans un silence de mouroir, englouti dans la stupeur et l’incrédulité pendant les premières semaines. Il ne réussissait à éviter songer inlassablement qu’il avait fait une énorme bêtise et que cela ne pouvait qu’être le début de la fin. L’angoisse qui faisait florès dans son esprit lui empêchait de faire n’importe quoi et les journées s’étaient écoulées comme une marée lente et infructueuse. Les repas, quand la faim essayait d’attirer son attention et qu’il s’en apercevait, étaient la seule activité qui battait la mesure des interminables matinées et des redoutables soirées dans l’obscurité funèbre du salon, enterré sur le canapé. Toutes les lampes éteintes, la tête fourrée dans le coussin et dans l’ombre profonde, sa main étendue sur le fauteuil à côté du canapé était la seule qui recevait un coup de pinceau par la lumière de la rue qui pénétrait à travers les rideaux transparents de la fenêtre. Et son regard restait figé sur le toit blanc pendant des heures, sans qu’aucune pensée accompagne les mouvements saccadés des yeux, seule preuve de vie. Après plusieurs heures fermement immobile dans cette position, lorsque même le canapé se lassait de lui donner abri, il prenait une douche et se déplaçait à nouveau en horizontal sur son lit, où il passait juste le temps nécessaire pour pouvoir se dire qu’il avait dormi. Juste quelques heures, avant de se mettre debout tôt le matin, comme s’il avait dû se mettre en marche dans l’orage d’une journée commune. C’était un rythme intérieur qui, à la fin de la nuit, déclenchait une série d’automatismes inconscients qu’il ne réussissait pas à supprimer avant de remarquer que tout avait changé, que rien n’était plus comme auparavant. Il devait se concentrer pour admettre à lui-même que la condition de chômeur qu’il vivait n’était qu’une opportunité, d’ailleurs choisie par lui-même. Donc il fallait prendre conscience que le contrôle des évènements se trouvait entre ses propres mains, même si, de prime abord, il semblait que tout ça l’amènerait à tout perdre et à vivre dans un taudis.  
Eh bien, ce matin-là Frédéric était resté dans son lit plus qu’à son habitude. Soudainement, presque sans rien faire, les coutumes qu’il avait toujours eues et qu’il avait retenues durant les jours précédents, semblaient ne plus vouloir le déranger.
En revanche, les goûts du réveil étaient amplifiés et prolongés. Le démarrage de la journée ne nécessitait pas qu’il saute du matelas et le rythme du corps pouvait s’adapter à celui de l’esprit. 
Son esprit décida alors de s’atteler à l’une d’entre les tentations les plus intrigantes qui lui parcourraient les neurones chaque matin, mais dont il se moquait en les faisant taire. C’était la restitution à la mémoire des rêves de la nuit. 

Il ne retenait ses rêves que pendant une poignée de secondes, juste après avoir ouvert les yeux. Seulement la sensation d’avoir quelques images derrière les paupières, amusantes ou inquiétantes, pourtant juste la sensation. Et les voilà évanouies dans la nature. Elles, les images, évanouies, mais pas la sensation ! Si c’était d’une belle sensation qu’il s’agissait, pas mal. Mais si c’était la suite d’un cauchemar, cela lui laissait un dégoût dans le ventre durant la journée entière. Et ce qui le dérangeait le plus, c’était qu’il n’avait aucune idée de ce qui lui donnait ce malaise insupportable.
Ce matin-là, il avait la chance que la sensation au réveil était apaisante et légère. Pas d’amertume lourde dans la gorge, pas de palpitations dans la poitrine. Il ne devait donc pas avoir peur de découvrir des choses épouvantables en les rapportant à la conscience. Avec le corps à moitié couvert par les draps, Frédéric commençait à analyser cette sensation qui se retenait encore dans son esprit et qui, il en était sûr, provenait d’un rêve de la nuit. 
D’abord, il prenait sa main droite dans sa main gauche : cela lui permettait de créer un cercle en dehors de son cœur, en empêchant l’haleine du rêve de sortir et s’enfuir. Cela faisait une vie entière qu’il ne faisait plus ce rituel de renaissance du rêve. Il le pratiquait presque chaque matin quand il était enfant et il ne débutait pas une journée sans savoir exactement ce que son esprit avait envie de faire après ce qu’il avait éprouvé pendant la nuit. La nuit était le début de la journée et rien ne pouvait commencer à bouger sans savoir ce qui avait fait démarrer l’âme quand les yeux étaient fermés. 
Le secret pour la bonne réussite de la renaissance des rêves, c’était de ne pas ouvrir les yeux avant de se concentrer sur le processus et de ne permettre qu’au peu de rayons de lumière matinaux de frôler les paupières.           
           
Il était assis, les jambes croisées, sur un drap écossais rouge et noir sur une énorme pelouse toute verte, ses mains fouillant dans un panier d’osier qui contenait des sandwichs soigneusement enroulés dans des serviettes en papier jaune. Il ne pouvait pas s’apercevoir où la pelouse terminait, car elle s’étendait sur plusieurs kilomètres carrés et des arbres séculaires se détachaient sur le paysage, donnant quelques îles d’ombre, comme celle au-dessous de laquelle Frédéric avait trouvé refuge. Il était habillé d’un tee-shirt bleu ciel et d’un bermuda beige, les pieds nus et ses baskets à côté. Une haleine de vent effleurait sa peau. Tout ça lui donnait l’impression que c’était le printemps et qu’il était en train de s’accorder un moment de répit loin de la ville. La mélodie des oiseaux heureux de pouvoir librement se déplacer depuis un chêne à un hêtre, c’était le seul son dont ses oreilles se remplissaient. Lui, le soleil, l’herbe, les arbres et les hirondelles. Et rien d’autre. La sérénité de ce moment était aussi véritable que s’il la vivait réellement. Sa faim n’avait besoin que de cette solitude pleine de compagnie pour s’éteindre. Et……pourquoi ne pas le faire vraiment ?

Il rouvrit ses yeux et tout à coup il lui semblait que ce n’était pas trop sorcier ! Comment était-ce possible que pendant les semaines précédentes il ne lui était jamais arrivé de songer qu’il y avait plein d’opportunités pour se libérer de cette insupportable sensation de défaite intérieure ? Ça faisait plus de trois semaines qu’il s’était totalement éloigné du monde réel et se conduisait comme s’il était mort. Lui, qui était toujours connecté, nuit et jour, à tout moment joignable sur son portable par n’importe qui ; lui, qui avait un compte sur n’importe quel réseau social et qui partageait presque chaque événement de sa journée sur son mur ; bien, il s’était radicalement déconnecté pendant plus que vingt-cinq jours et avait éteint tous les appareils qui puissent permettre à l’univers d’entrer en contact avec lui.
Sa famille avait été prévenue qu’il serait présent malgré sa volontaire absence. Ses proches avaient toujours été respectueux de ses désirs, même les plus absurdes. Au début, ils avaient essayé de parfois lui téléphoner ou de lui envoyer des messages. Pourtant, après avoir compris qu’il s’était enfermé chez lui comme dans un bunker et que cet état d’ermitage lui fallait vachement, ils s’étaient sentis rassurés et avaient fini par la boucler là-dessus.
Et les amis…ils auront reçu de nouvelles plus ou moins rassurantes par sa famille ou…ils n’étaient pas tellement amis pour le déranger pendant son silence. Donc son isolement s’était écoulé sans aucune interruption par l’extérieur…ni par l’intérieur ! Jusqu’à ce lundi matin.

Frédéric sauta à bas du lit, il ne voulait pas attendre plus de dix minutes pour prendre une douche, s’habiller et courir au pré le plus proche, afin de réaliser la scène qui lui était apparue en rêve et qui lui avait donné la solution la plus simple pour arrêter de vivre sans but comme un artichaut reclus chez lui.
La tempête intérieure qu’il éprouvait demandait une vitesse d’action exceptionnelle. Huit minutes plus tard, rapide comme une fusée, il était déjà dehors, se promenant sur le trottoir en direction de la gare pour monter dans le premier train qui puisse l’amener vers son objectif. Pas de portable dans sa poche, peu d’argent dans son portefeuille, juste le nécessaire pour acheter le billet. Cependant, il remarqua que personne n’était dans la rue, très bizarre pour un lundi matin. Il conclut qu’il devait avoir perdu le sens du temps du fait de son ermitage et qu’on était dimanche au lieu de lundi. Tant mieux ! Pourtant, en se rendant à la gare il constata qu’une vieille dame marchait sur le trottoir plutôt vite, en le regardant comme s’il était un extraterrestre. Quoique étonné, il poursuivit son parcours jusqu’à la gare, qui était totalement fermée, sans personne aux alentours à qui demander quelques renseignements sur cette bizarre situation. Il décida alors de revenir en arrière pour chercher la dame qui lui avait lancé un regard noir. Quand il la rejoignit, il s’aperçut d’un autre détail bizarre : elle avait un masque sur son visage, couvrant le nez et la bouche.

« Excusez-moi madame. Sauriez-vous me dire pourquoi la gare est fermée ? », demanda Frédéric.
La dame faillit tourner de l’œil.
« Comment se fait-il que vous ne le sachiez pas ? », dit la dame, d’une voix tremblante.
« Quoi ? »
« Ça fait vingt jours qu’on est tous en quarantaine ! »